Toute entreprise dans un environnement concurrentiel a besoin de piloter ses résultats afin de suivre sa performance commerciale et financière, veiller à sa rentabilité et à sa capacité à se financer mais comment le peut-elle si elle dispose de prévisions statiques, peu connectées avec l’évolution de l’environnement économique ?
Dans un contexte d’incertitude sur les évolutions des marchés ou bien sur les coûts et délais de production, il devient encore plus critique de savoir anticiper et surtout se préparer à plusieurs scénarios possibles sur son business.
Beaucoup d’entreprises mettent en place, avec leur direction financière, des processus de rolling forecast afin de pouvoir réduire cette incertitude et piloter agilement leurs activités.
En quoi consiste le rolling forecast et quels sont les enjeux auxquels il peut répondre ?
Le rolling forecast est un processus de pilotage de la performance qui vise à donner au management de la visibilité sur les résultats futurs de l’entreprise (qui peuvent être financiers comme opérationnels), pour anticiper les évolutions à venir et leurs impacts et pouvoir organiser des plans d’actions.
Il se doit d’être produit régulièrement et rapidement, sans trop de coûts/efforts internes et donne théoriquement lieu à un examen et discussion au niveau du management sur les actions à mettre en œuvre.
Par rapport à un processus classique de budget ou de reprévision annuelle, il se caractérise par une fréquence de production plus forte (idéalement mensuelle) et un horizon de prévision glissant (généralement 12 ou 18 mois, mais qui peut être spécifique selon le cycle du business de l’entreprise).
Ainsi, par exemple, en avril 2023, une entreprise pourrait disposer d’une prévision jusqu’à octobre 2024 par exemple et, le mois suivant jusqu’à novembre 2024.
Un rolling forecast traduit l’évolution la plus probable des paramètres économiques qu’ils soient externes (par exemple inflation, évolution des taux d’intérêt, nouvelles réglementations …) ou internes (par exemple, décalage d’un lancement produit, changement de sourcing fournisseur …) et s’appuie fortement sur l’exploitation de ce type d’information. Une articulation et une cohérence fortes avec les processus de prévisions de ventes, d’achats, de production… sont capitales.
Quelques bonnes pratiques nous semblent importantes à appliquer et nous allons vous en illustrer 5, issues de nos retours d’expériences clients :
1ère bonne pratique : la régularité
Afin de mettre en place une véritable routine et culture du prévisionnel et de l’anticipation, le rolling forecast aura d’autant plus de valeur s’il est produit régulièrement en termes de fréquence et s’il propose toujours un horizon de temps similaire. Cela permet une stabilité de la méthode pour les contributeurs et une stabilité des livrables attendus pour le management. S’il est convenu par exemple qu’il faut à une entreprise pouvoir anticiper d’au moins 12 mois l’impact d’événements extérieurs ou ou de décisions internes, cet horizon doit pouvoir être systématiquement éclairé.
2ème bonne pratique : un traitement différentié des KPI
Contrairement au budget ou au reporting du réel, il est tout à fait concevable de prioriser les KPI à projeter lors du rolling forecast et de ne pas fonctionner de manière homogène sur tout le plan de comptes ou le bilan. En effet, certains indicateurs ou KPI sont moins volatiles que d’autres et peuvent être reprojetés à moins grande fréquence. Il faudra donc adapter et choisir les indicateurs pertinents.
Ceci implique que toutes les fonctions de l’entreprise ne soient pas forcément pilotées via le rolling forecast. Par exemple, si les services généraux d’une entreprise ont mis sous contrôle leurs coûts et ont, par ailleurs, abonné auprès de leurs fournisseurs une grande partie de ces frais, il ne sera d’aucune utilité de leur redemander tous les mois leur nouvelle prévision à 12 mois. En revanche, une augmentation substantielle des forfaits ou abonnements à l’échéance des contrats sera une information importante à capter en associant cette fonction de l’entreprise à certains cycles de prévision.
3ème bonne pratique : une granularité analytique au juste nécessaire
De la même manière, le niveau de détail analytique doit être adapté à ce qui fait sens en termes de variation. On évitera un excès de détail superflu et non pertinent qui ralentirait le délai de production. Pour cela, l’examen du modèle de gestion de l’entreprise, de la source d’information sur les données analytiques et la détermination des inducteurs de performance seront précieux. (faire un renvoi vers l’article de Romain sur le mot « modèle de gestion »)
4ème bonne pratique : une limitation des réallocations internes
Par principe, le rolling forecast doit servir aux différents responsables dans l’entreprise à définir ou réorienter leurs plans d’actions opérationnels. A la différence de ce qui existe dans les processus budgétaires et de reporting du réel, il est souvent contreproductif de procéder à des réallocations internes de frais dans le processus du rolling forecast, non seulement parce que cela rallonge le processus de production mais aussi parce que cela dilue les responsabilités directes et risque de réduire la rapidité de décision et réaction souhaitée.
5ème bonne pratique : l’utilisation de systèmes d’information adaptés
La fluidité de circulation de l’information et la capacité à traiter fréquemment une grande quantité de données très diverses sont essentielles pour rendre le processus le plus efficace possible. Il est donc souvent préférable de pouvoir disposer d’outils adaptés et performants comme les outils dits EPM (Enterprise Performance Management). Ceux-ci permettent à la fois de collecter les données structurantes sur l’évolution des paramètres de la performance, d’aider à la prévision des résultats par des modèles de projection, de consolider la prévision des différents métiers sollicités et d’analyser cette prévision selon les différents axes qui auront été retenus.
Si l’expérimentation d’un processus rolling forecast peut se faire au démarrage sans soutien de ce type d’outils, la durabilité du processus l’exigera sans aucun doute par la suite.
Véronique FIDEL-LEVY, senior manager BU Finance